Si vous vous intéressez au processus d’innovation et de créativité, vous avez sûrement entendu ces phrases de nombreuses fois : « move fast and break thing », « l’échec est nécessaire à l’innovation », ou, comme l’a très joliment dit James Joyce : « les erreurs sont les portes de la découverte ».
Mais en réalité, nous sommes souvent un peu hypocrites quand nous en venons aux échecs. Faire l’éloge de l’erreur, oui, tant que ce n’est pas de nos erreurs que nous parlons. Face à un échec personnel, notre premier réflexe est généralement d’effacer toute trace de l’événement et de ne plus jamais en parler.
Et pourtant, faire des erreurs est effectivement une incroyable forme d’apprentissage. Expérimenter, prendre des risques est crucial dans beaucoup de domaines. Si nous n’échouons jamais, c’est que nous ne prenons pas assez de risques (ou que nous nous mentons à nous même). Si nous échouons trop souvent, c’est qu’il y a un problème. Alors comment réussir nos échecs ?
1. Célébrer pour partager
L’un des points clés de la célébration est le partage. Que ce soit avec nos proches ou nos collègues, célébrer avec eux nos succès nous aidera à créer du lien. Le plaisir d’un succès est contagieux. Nous nous réjouissons toujours du succès de quelqu’un même si nous le connaissons peu et que nous n’avons joué aucun rôle dans le succès en question. Ce que nous savons moins, c’est que célébrer un échec crée tout autant de liens. Quelqu’un qui affirme n’avoir jamais échoué nulle part est soit un menteur soit un extraterrestre. Et ces deux types de personnalité ne font pas vraiment des bons amis.
Célébrer, c’est aussi remettre du fun et de la légèreté dans nos journées de travail souvent surchargées. Nous prenons rarement le temps de faire le point sur tout ce que nous avons accompli pendant l’année, le mois, la semaine. Formalisons des moments pour partager nos succès avec nos collègues ou amis. Cela nous permettra d’ancrer nos réussites et de rester positifs dans les moments plus difficiles.
C’est aussi en les célébrant, en les partageant que nous pourrons vraiment apprendre de nos succès comme de nos échecs. Parfois, et c’est d’autant plus vrai pour les femmes, nous avons tendance à simplement dire “j’ai réussi parce que j’ai eu de la chance”. Quand nous partageons nos succès, partageons aussi nos 2 ou 3 compétences clés qui nous ont permis de réussir. Cela boostera notre confiance en nous.
De la même manière, face à un échec, nous accentuons souvent notre rôle personnel : nous nous concentrons sur nos défauts et nos manques. Cela ne crée que du négatif. Parfois, nous ne verrons que le rôle de notre environnement : je n’avais pas assez de moyen, le marché n’était pas bon. Ce sont des éléments sur lesquels nous n’avons pas de contrôle. Dans les deux cas, il ne ressort rien de positif de notre échec. Admettre et partager nos erreurs avec nos collègues ou amis nous, permettra d’obtenir une autre vision de la situation.
Un de mes clients m’a raconté ce qu’il voyait comme son plus gros échec. Il s’était lancé dans l’organisation d’événements. Son premier a extrêmement bien marché et il n’a eu que des retours positifs. Il se sentait parfaitement en confiance pour en lancer un deuxième. Mais cette fois là, seulement 4 personnes sont venues … Il s’est dit que son premier succès n’était dû qu’à la chance et qu’il n’avait pas les compétences nécessaires pour continuer. Il pensait tout arrêter. Mais, en l’écoutant, je me suis rendu compte que, si son deuxième événement n’avait pas marché c’est qu’il n’avait pas aussi bien exploité son réseau que pour le premier. Mon client a alors organisé un troisième événement en ne reproduisant pas la même erreur et il a de nouveau eu beaucoup de succès. En partageant nos échecs, nous pourrons les rendre positifs. Le point de vue extérieur de nos amis et collègues nous permettra de mieux voir nos erreurs et d’en apprendre quelque chose. Vous pouvez ainsi organiser des Fuck up Nights. Le principe : des personnes sont invitées à partager leurs échecs pendant une dizaine de minutes. Les participants peuvent ensuite échanger, poser des questions, donner leur avis. Cela permet à chacun de tirer de la valeur ajoutée d’un échec !
2. Accepter ses échecs et ceux des autres
Accepter nos échecs nous aidera à accepter ceux de nos équipes. Développer un nouveau produit, trouver une solution créative demande de prendre des risques : peut-être que cela ne marchera pas. Mais si nous ne prenons pas de risque, si nous continuons à faire toujours la même chose alors que cela ne marche pas parfaitement, nous ne nous transformerons jamais. Il est donc crucial d’autoriser nos collaborateurs à faire des erreurs. C’est ce qu’a mis en place l’entreprise indienne Tata qui récompense chaque année les plus gros succès mais aussi les meilleures tentatives. L’équipe qui a trouvé une très bonne idée qui n’a pu être mise en pratique reçoit un prix nommé « Dare to Try award ». Ses membres sont félicités par le CEO de l’entreprise au même titre que les membres de l’équipe qui a le mieux réussi.
Maintenant, cela ne veut pas dire que tous les échecs doivent être acceptés et célébrés. En tant que manager, faisons la différence entre le mode exécution et le mode expérimentation. Dans l’exécution, l’échec provient d’un process qui n’a pas été respecté. Au contraire, dans l’expérimentation, nous créons quelque chose de nouveau. Nous avons alors besoin de créativité et de prise de risque. Même si nous échouons, nous aurons appris et avancé. A ce niveau, si nous n’échouons jamais, c’est que nous ne prenons pas assez de risques ! Formalisons donc clairement nos demandes entre exécution et expérimentation. Cela permettra à nos collaborateurs de comprendre le niveau de risque acceptable.
Si vous avez beaucoup de réussites, cela peut-être d’autant plus intéressant de partager vos échecs. En tant que manager, si vous ne partagez que vos succès, vous pouvez donner l’impression que vous n’échouez jamais. Cela risque d’accentuer la peur d’échouer chez vos collaborateurs. Pour les aider à mieux accepter leurs erreurs, partagez les vôtres ! Plusieurs scientifiques très brillants dans leur domaine ont ainsi décidé de partager leur « CV d’échec ». Ils ont répertorié tous les articles qu’ils n’ont pas réussi à publier, les postes qu’ils n’ont pas réussi à avoir etc… De tels CV dédramatisent les échecs et les rendent ainsi plus bien faciles à accepter !
3. Observer ses échecs pour mieux se connaître
Nous rencontrons tous des échecs par manque de temps ou d’énergie. Nous pouvons manquer l’appel d’un client à cause d’une réunion urgente et imprévue. Ou manquer cette réunion parce que la deadline d’un projet vient soudainement d’avancer. Ensuite, nous, ou l’un de nos proches, pouvons tomber malades et nous devrons encore changer nos priorités. Ces petits échecs ne font que souligner les limites de nos ressources. Chaque jour, nous devons faire des choix entre chacun de nos objectifs et essayer de faire le maximum avec les ressources que nous avons. Nous pourrions passer rapidement sur tous ces petits échecs et avancer. Mais les observer et les comprendre nous aidera à mieux gérer notre temps. Tous les six mois ou tous les trimestres, prenez un moment pour revenir sur tout ce que vous n’avez pas réussi à accomplir. Cela peut être uniquement des tâches professionnelles ou bien des éléments plus personnels comme faire du sport ou se coucher à une heure fixe.Si vous vous rendez compte que vous échouez systématiquement à faire certaines tâches, cela peut-être un signe de manque de motivation ou d’engagement. Au contraire, si vous n’échouez jamais, vous êtes peut-être un peu trop perfectionniste.
Alors oui, plus nous passons de temps sur un projet, plus nos résultats tendent à être bons. Mais cela veut aussi dire que nous avons moins de temps disponible pour d’autres choses qui réclament aussi notre attention. Demandez des feedbacks à vos collègues ou à vos proches pour mieux gérer vos priorités. Autorisez-vous de petits échecs occasionnellement, les imprévus sont toujours possibles !
Faire plus attention à nos échecs nous aidera aussi à en savoir plus sur nous. Deux de mes plus gros échecs furent de me faire licencier pour de mauvaises raisons alors que le business allait très bien. Les deux fois ce fut à cause d’une mésentente avec mon manager. Je lui avais dit un peu trop directement ce que je pensais de lui. La première fois, cela m’a permis de comprendre l’importance de la politique en entreprise. Cela m’a aidé à construire de meilleures relations avec mes supérieurs. La deuxième fois, cela m’a fait comprendre que je préférais être mon propre patron. C’est à ce moment là que j’ai choisi de fonder Be&Lead. Même si ces échecs ont été difficiles à accepter sur le coup, je suis parvenu à prendre le recul nécessaire pour mieux les comprendre. Et je m’en félicite tous les jours depuis !
Observer ses échecs nous aidera aussi à prendre la mesure de la valeur que nous accordons à quelque chose. Si nous ne parvenons pas à avancer après un échec, c’est peut-être que nous ne sommes pas très motivés par notre objectif à la base. Au milieu de sa première année de médecine, ma fille n’avait pas un très bon classement. Je me suis alors demandé si c’était vraiment la voie qu’elle avait envie de suivre. Mais cet échec ne l’a rendue que plus déterminée et elle a redoublé d’efforts. Résultat : elle a validé son année du premier coup !
Même s’ils sont durs à avaler sur le coup, revenons régulièrement sur nos échecs. Nous nous connaîtrons mieux. Nous aurons une meilleure confiance en nous. Nous transformerons nos échecs en réussites.
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Merci Gilles pour cet article à nouveau si important : Je ne connaissais pas les Fuck up nights mais crois que je vais en organiser régulièrement avec un bon verre de rouge !
Excellent et inspirant merci !!